En bref
Le projet est une coopérative d’habitation pour environ 10 foyers à Saillon en Valais. Celle-ci prendra place sur une parcelle de 4000m2 prêtée sur le mode du droit de superficie. Elle est constituée de maisons en bois préfabriquées qui sont conçues avec des artisans locaux.
Le projet poursuit 5 buts:
Une observation
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Le projet se veut exemplaire en matière de développement durable, notamment au niveau de ses constructions. Elles sont fabriquées à partir de matériaux naturels et sont sur pilotis afin de réduire leur empreinte au sol et ainsi préserver la terre. Le paysagisme du projet intègre les vignes typiques de la région, en les complétant d’autres espèces indigènes afin d’augmenter la biodiversité.
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Le projet sera construit avec des matériaux et du savoir-faire locaux. Les artisans qui sont inclus dans la conception et la réalisation du projet sont actifs dans la région et ont de ce fait une compréhension des conditions spécifiques au lieu. L’usage de bois indigène, travaillé de manière traditionnelle permet par exemple non seulement une empreinte carbone réduite, mais également une bonne résistance aux conditions météorologiques de cette région alpine.
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Les maisons sont conçues à partir d’un système constructif entièrement modulaire. Il permet de créer différents types et tailles de maisons. Les détails sont standardisés et les différents éléments qui constituent la maison sont prévus de manière à être compatibles. La maison peut s’adapter au fur et à mesure de l’évolution du mode de vie de ses habitants . L’organisation interne des maisons est indépendante de la structure qui l’entoure, ce qui permet de multiples configurations. Cette conception permet également de préfabriquer les éléments en atelier ce qui limite le temps sur le chantier et permet ainsi de maîtriser les coûts et la qualité.
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Le projet peut accueillir plusieurs générations de personnes. Le système constructif permet de créer différents types, de manière à répondre aux besoins spécifiques de chaque foyer. Cette mixité permet une symbiose entre les générations, une entraide typique des coopératives d’habitation.
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Cette coopérative est une réelle alternative aux modes d’habitation classiques. Le financement intéressant accordé aux coopératives, les économies d’échelle ainsi que la préfabrication des éléments permettent de construire le projet à un coût avantageux. Ce prix de construction s’accompagne de frais fixes relativement bas grâce à une bonne isolation et un chauffage écologique.
Traditionnellement, les familles suisses étaient sédentaires, attachées à leurs terres ancestrales. Les enfants reprenaient les rennes des entreprises familiales ce qui limitait leurs déplacements. En 1975 dans les régions agricoles par exemple, seul 14% de la main-d’oeuvre était employé hors du cadre familial. Les exploitations restaient donc dans la famille et étaient une affaire de famille. Leurs habitations étaient de ce fait conçues et construites pour durer, car transmises de génération en génération. Parfois érigées en bois, souvent en pierre elles étaient généralement vastes, car les familles étaient nombreuses, mais dotées de petites pièces. En 1876 par exemple le nombre d'enfants par famille(ICF) était de 4.4, en 1964 il passe à 2.7. L’aménagement du territoire et le développement durable n’étaient pas encore au coeur des préoccupations.
Durant l’après guerre, la forte croissance démographique demande de nouvelles méthodes de construction, auquelles répond le mouvement moderniste. Durant cette période, le béton armé est employé à large échelle afin de reconstruire une Europe en ruines. Ce matériau était intéressant du fait de la rapidité de sa mise en oeuvre et son coût relativement faible. Aujourd’hui, alors que la plupart des bâtiments de l’époque sont démolis afin de faire place à du neuf, nous nous rendons compte à quel point ce matériau est difficile à recycler, combien ces constructions ont un impact conséquent sur leur environnement et combien elles sont difficiles à adapter. Actuellement, chaque seconde la Suisse bétonne environ un mètre carré de son territoire et les constructions contemporaines font souvent usage de ce matériau.
La Suisse a pourtant fortement évolué durant ces dernières décennies. La famille se réduit à 1.5 enfant par couple, le développement des moyens de transports, l’essor des professions du secteur tertiaire et l’exode rural modifient profondément la structure de la société. Les Suisses sont devenus plus mobiles, les centres urbains se développent, et il n’est plus rare de quitter sa région d’origine pour poursuivre des études ou pour des raisons professionnelles. Ces transformations entraînent de profonds changements démographiques pour certaines régions.
Hors des centres urbains, la population diminue, ce qui réduit les services et par conséquent l’attractivité. La construction dans les régions périphériques n’a cependant pas ralenti, avec l’essor du tourisme et des résidences secondaires. Ces développements ne sont pas sans conséquences, comme le phénomène des lits froids, le mitage du territoire, contre lesquels les législations se durcissent. Ce frein est difficile à accepter pour ces régions, et les oblige à se réinventer, alors que certains bâtiments construits il y a moins de 50 ans sont déjà détruits pour être reconstruits. Il semble capital de trouver une nouvelle façon de construire dans ces régions, un mode moins permanent et plus souple d’occupation du territoire. A ce sujet, Peter Richner, directeur du laboratoire fédéral pour le développement des matériaux dit par exemple: “La flexibilité est la clef de la durabilité d’un bâtiment: les planificateurs doivent prévoir un changement dans l’utilisation des espaces et les concevoir afin qu’ils puissent être modifiés aisément.”
Au vu de cette rapide évolution, il est intéressant d’observer le standard de construction suisse. Avec les méthodes de construction modernes, un bâtiment est conçu pour durer 70 à 100 ans. Cette importante durée de vie ne serait pas problématique en soi, si les constructions demeuraient pertinentes aussi longtemps. Or les besoins et les attentes évoluent vite et la construction traditionnelle est coûteuse à rénover. Une cuisine ou une salle de bain sont par exemple remplacées tous les 30 ans environ. Autre exemple, les bâtiments industriels sont détruits en moyenne tous les 30 ans, avec un grand impact écologique, car ils ont alors rempli leur objectif financier. Les systèmes constructifs propriétaires et leur obsolescence rendent difficile l’entretien des bâtiments. On observe donc que les méthodes de construction classiques qui mettent l’accent sur la durée de vie des bâtiments sans prendre en compte l’évolution des besoins tombent rapidement en désuétude et posent un problème au niveau de l’environnement et du paysage.
La situation semble s’accélérer, c’est pourquoi la question suivante est importante: quelle pourrait être une alternative intéressante et durable à la vie hors des centres urbains?